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Algérie. Une sidérurgie aux pieds d’argile

Algérie. Une sidérurgie aux pieds d’argile

Algérie. Une sidérurgie aux pieds d’argile. Mohamed-Cherif Drifi
Ayant l’un des complexes sidérurgiques les plus importants en Afrique, en l’occurrence le complexe d’El-Hadjar, l’Algérie peine à valoriser ses potentialités en matière de matériaux ferreux au point que le prix du rond à béton joue au yoyo sous l’effet de la spéculation et de son emprise par le marché noir, appelé communément la mafia du rond à béton. L’envolée spectaculaire des prix du rond à béton et l’absence de régulation d’un important marché qui est considéré comme étant la pierre angulaire du programme d’un millions de logements lancé par le président de la République prouve, on ne peut plus clair, la précarité d’un secteur stratégique qui aurait pu galvaniser le secteur de l’industrie lourde. N’empêche, pour jetter les jalons d’une véritable réflexion à même d’enclencher des réformes dans ce secteur pour assurer son contrôle, la seule décision qui a été prise par les autorités est celle de la subvention. En effet, le ministre de l’Habitat et de l’Urbanisme a annoncé, en mars dernier, que les pouvoirs publics ont pris des «mesures urgentes» pour répondre aux problèmes de disponibilité des matériaux de construction et la régulation de leurs prix en Algérie. Selon toujours le ministre, cela répond au souci d’assurer une continuité des chantiers pour le respect des délais que ce soit dans le secteur du bâtiment ou celui des travaux publics. Pour ce faire, deux conseils des ministres ont examiné ce dossier durant lesquels, il a été décidé de subventionner le rond à béton, sur la base d’une évaluation, car l’augmentation des prix du pétrole a induit automatiquement l’augmentation des prix de l’acier. Mais cette option est-elle la plus adaptée pour mettre un terme à cette déliquescence qui touche le marché du rond à béton où s’agit-il d’une décision provisoire pour sauver les meubles et faire bonne figure devant le président de la République qui accorde une priorité primordiale à son projet. Ainsi donc, cette frénésie des prix, avec une hausse de 5 000 DA à 12 000 la tonne, a fait que quelques 70% de nos chantiers sont à l’arrêt. Toutefois, ce qui est paradoxal, est que même si le complexe d’El-Hadjar surproduit au point où certains observateurs avertis ont tiré la sonnette d’alarme, l’Algérie importe 80% de ses besoins en la matière, du fait que la production de Metal Steell est destinée à l’exportation. Cette tendance à l’exponentielle est la résultante des conséquences de la liberté accordée à ce commerce en Algérie qui dépend entièrement des importations de ce produit stratégique. Le géant de l’acier, l’Indien Arcelor Metal Steel, qui est considéré comme le leader sur le marché local, est en grande partie à l’origine de ces fluctuations, de plus, les circuits nationaux de distribution du rond à béton restent désorganisés. Dans le volet économique, cette désorganisation a généré un effet de boule de neige, dans la mesure que c’est toute la chaîne entrepreneuriale qui est touchée de plein fouet par le retard enregistré dans la réalisation des travaux et la révision irréversible à la hausse des montants des travaux, ce qui a entraîné dans beaucoup de cas une résiliation de contrats toujours aux torts de l’entrepreneur. Autre point à soulever, est que même les mécanismes incitatifs à la construction individuelle dégagés par l’Etat, pour résorber la crise de logement en encourageant la construction, sont devenus caducs dès lors que la hausse vertigineuse du rond à béton - quand il ne s’agit pas carrément d’une pénurie caractérisée ou orchestrée – décourage le plus téméraire à se lancer dans la construction. En plus, face à ce manque flagrant de matériaux de construction de base, les nouvelles dispositions prises par les autorités pour sanctionner les propriétaires des habitations non achevées semblent planter un décor kafkaïen. En d’autres termes, exiger à quelqu’un de terminer les travaux de son habitation et ne pas lui offrir les matériaux nécessaires pour le faire est plus que déroutant. En effet, cette histoire de rond à béton ne fait que conforter les personnes qui pensent que nous tournons toujours en rond.

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mercredi 3 septembre 2008