Foire en ligneActualités
Pénurie de compétences et robotique : le défi qui redéfinit l’atelier métallurgique européen

Pénurie de compétences et robotique : le défi qui redéfinit l’atelier métallurgique européen

Pénurie de compétences et robotique : le défi qui redéfinit l’atelier métallurgique européen

Les données du Labour and Skills Shortage Index


Beaucoup d’entreprises du secteur de la transformation des métaux signalent depuis longtemps des difficultés à trouver des profils techniques adaptés, en particulier pour des rôles liés à la production, à la maintenance et à la gestion des machines. Pour comprendre dans quelle mesure ce phénomène relève de la perception et dans quelle mesure il est étayé par des preuves objectives, il est utile de se référer aux données de l'indice de pénurie de main-d'œuvre et de compétences (LSSI - Labour and Skills Shortage Index) élaboré par le Cedefop, l’Agence de l’Union européenne spécialisée dans la formation professionnelle et le développement des compétences.

 

Pour la catégorie Métallurgie, machinerie et métiers connexes, l’indice attribue les valeurs 1-1-3 dans les trois dimensions analysées — demande, offre et mismatch — sur une échelle allant de 1 pour « faible pression » à 4 pour « pression élevée ». La lecture croisée des valeurs montre que la demande et l’offre de main-d’œuvre restent relativement stables, tandis que le principal problème réside dans le déséquilibre entre les compétences requises et les compétences disponibles.

 

En d’autres termes, le problème n’est pas tant le nombre de personnes présentes sur le marché, mais plutôt la mesure dans laquelle leurs compétences correspondent réellement aux besoins des ateliers de plus en plus automatisés et numérisés. C’est là que des postes tels que ceux d’opérateurs CNC, de techniciens de maintenance industrielle, de soudeurs qualifiés et de techniciens en mécatronique mettent en évidence l’écart le plus marqué entre les besoins et l’offre actuelle.




La situation sur le marché du travail en France

 

Un regard sur le contexte français confirme que la pénurie de compétences techniques dans la métallurgie est désormais bien établie. Selon l’Enquête Besoins en Main-d’Œuvre 2025 de France Travail, les métiers de la métallurgie présentent des difficultés de recrutement comprises entre 59,5 % et 74,1 % selon les régions. Ce niveau place la filière parmi les secteurs les plus touchés au niveau national.

 

Les transformations technologiques et organisationnelles en cours accentuent la pression sur les compétences techniques. Selon l’Observatoire de la Métallurgie, les besoins en recrutement dans le secteur mécanique devraient varier entre 35 000 et 50 000 personnes par an entre 2025 et 2035, tous scénarios confondus. Les métiers les plus concernés sont la maintenance, l’usinage, l’installation, la conception et les fonctions de production, portés par les départs en fin de carrière, les mobilités professionnelles et l’adaptation aux nouvelles exigences industrielles.

 

Même dans le scénario le plus favorable, les entreprises devront faire face à une demande soutenue de profils qualifiés. Le rapport souligne que répondre à ces besoins implique non seulement un renouvellement important des effectifs, mais aussi une montée en compétences continue, soutenue par l’attraction de nouveaux talents et le renforcement de la formation.

 

L’automatisation comme réponse stratégique

 

Dans ce contexte, de nombreuses PME métallurgiques accélèrent leurs investissements dans l’automatisation. Cette tendance reflète des dynamiques globales clairement visibles dans les chiffres. Selon le rapport World Robotics 2025, 542 000 robots industriels ont été installés en 2024 dans les usines du monde entier — plus du double qu’il y a dix ans. Les installations annuelles ont dépassé le seuil des 500 000 unités pour la quatrième année consécutive.

 

Cet essor global témoigne d’une accélération de l’automatisation qui, bien qu’elle concerne principalement des zones à forte intensité productive (notamment l’Asie), offre aussi des indications utiles aux PME européennes : pour beaucoup, l’automatisation devient un pilier pour maintenir compétitivité, efficacité et stabilité des cycles de production.

 

Pour les entreprises actives dans le découpage, l’usinage CNC, la soudure ou l’assemblage, mais pas uniquement, investir dans des robots collaboratifs, des systèmes d’alimentation machine ou des cellules automatisées ne signifie pas seulement améliorer la productivité, mais aussi répondre à un contexte où les compétences deviennent de plus en plus rares.

 

Nouveaux profils professionnels et nouvelles responsabilités

 

L’autre face de la pénurie de compétences est que la technologie, à elle seule, ne suffit pas. Les entreprises qui investissent dans la robotique doivent développer de nouveaux profils hybrides : des opérateurs capables de gérer des cellules automatisées, des techniciens dotés de compétences mixtes en programmation, diagnostic et maintenance électronique. Le mismatch — c’est-à-dire la divergence entre compétences attendues et compétences réelles — ne concerne donc pas seulement la disponibilité de personnel, mais aussi sa préparation : l’avenir de l’atelier européen exige des profils plus complets, capables non seulement d’utiliser la technologie, mais de la rendre possible.

 

Un changement de paradigme pour la compétitivité

 

La combinaison entre pénurie de compétences et croissance de l’automatisation représente aujourd’hui un carrefour stratégique pour toute la filière métallurgique. Les entreprises capables d’intégrer investissements technologiques, formation interne et collaborations structurées avec des instituts techniques pourront garantir une meilleure continuité opérationnelle et une gestion plus stable des charges de production. À l’inverse, celles qui resteront ancrées dans des modèles organisationnels traditionnels risquent d’amplifier les effets des difficultés à trouver du personnel qualifié.

 

Bibliographie essentielle (et non exhaustive)

 

Cedefop – European Centre for the Development of Vocational Training.
Labour and Skills Shortage Index – Briefing Note.
Disponible sur : https://www.cedefop.europa.eu/files/9202_en.pdf

 

EURES – European Employment Services.
Labour shortages and surpluses in Europe.
Disponible sur : https://eures.europa.eu/living-and-working/labour-shortages-and-surpluses-europe_en

 

OECD – Organisation for Economic Co-operation and Development.
Labour Market Shortages and Labour Market Inequalities.
Disponible sur : https://www.oecd.org/content/dam/oecd/en/publications/reports/2025/03/labour-shortages-and-labour-market-inequalities_798f8a8f/14e62ec0-en.pdf

 

International Federation of Robotics (IFR).
Global robot demand in factories doubles over 10 years – Press Release.
Disponible sur : https://ifr.org/ifr-press-releases/news/global-robot-demand-in-factories-doubles-over-10-years

 

Enquête Besoins en Main-d’Œuvre 2025 – France Travail.
Disponible sur : https://statistiques.francetravail.org/bmo/bmo?fg=CH&la=0&pp=2025&ss=1

 

Étude prospective des besoins en recrutement dans la Métallurgie à horizon 2030-2035 – Observatoire de la Métallurgie.
Disponible sur : https://www.observatoire-metallurgie.fr/sites/default/files/2024-10/02_OBSM_PROSPECTIVE_FICHE_SECTEUR_MECANIQUE_221024_V3.pdf

 

undefined
mardi 2 décembre 2025